Il est l’un des trois cinéastes japonais majeurs du XXe siècle, avec Akira Kurosawa et Kenji Mizoguchi, mais au sein de cette formidable trinité, il est peut-être le plus universel. Yasujiro Ozu (1903–1963), découvert tardivement par la critique française, est depuis longtemps déjà, dans son pays, un cinéaste réputé.
Cinéphile depuis l’adolescence et grand amateur de cinéma américain, le jeune réalisateur met en scène jusqu’en 1936 une trentaine de films muets (dont la moitié sont perdus), privilégiant la comédie réaliste, parfois teintée de burlesque. Il épure son cinéma, adoptant un point d’observation qui sera désormais sa signature : la caméra épouse le regard d’un homme accroupi sur un tatami, mettant la mise en scène au niveau de l’humain.
Après deux ans sur le front de la seconde guerre sino-japonaise, Ozu entame la partie la plus prestigieuse de son parcours : entre 1937 et 1962. Sa vision magistrale et minutieuse des rapports humains offre un regard perçant sur la famille, les liens complexes entre les générations, la transformation d’un mode de vie traditionnel dans un pays qui s’ouvre peu à peu à l’Occident, ou chacun peut se reconnaître, à l’image des chefs-d’œuvre que sont Il était un père (1942), Voyage à Tokyo (1953), peut-être son film le plus célèbre, ou, après qu’il eut enfin accepté de passer à la couleur, Herbes flottantes (1959).
Comme le dit Wim Wenders, prix Lumière 2023, dans son documentaire Tokyo-Ga : « S’il y avait un trésor sacré du cinéma, alors pour moi, cela devrait être l'œuvre de Yasujiro Ozu. Bien qu'ils soient entièrement japonais, ces films sont en même temps universels. J'ai pu y reconnaître toutes les familles de tous les pays du monde, ainsi que mes parents, mon frère et moi-même. »
Remerciements à Carlotta Films
À retrouver à la librairie du Premier-Film
de Kiju Yoshida (Institut Lumière / Actes Sud)
Dans ce livre essentiel, Kiju Yoshida revient sur le parcours, le style et l’esprit d’Ozu dont il fut l’assistant. Issu comme lui des studios Shôchiku, il exalte la singularité et la poésie de l’œuvre d’Ozu, ses débuts dans le cinéma muet, sa technique (la légendaire caméra “au ras du sol”) et sa façon de faire de l’anti-cinéma.
SOIRÉE d'ouverture
Présenté par Maelle Arnaud
Mardi 28 novembre à 19h
Voyage à Tokyo (Y. Ozu, 2h16)
Un couple âgé entreprend un voyage pour rendre visite à ses enfants. D’abord accueillis avec les égards qui leur sont dus, les parents s’avèrent bientôt dérangeants. Personne ne trouve de temps à leur consacrer. Les enfants se cotisent pour les envoyer dans une station thermale… Pour Kiju Yoshida (Ozu ou l’anti-cinéma, Institut Lumière/Actes Sud, 2004) : « Le Voyage à Tokyo est l’œuvre la plus aboutie de sa carrière, dévoile la profondeur de son art et donne tous les indicateurs qui permettent de déchiffrer son univers. »
→ Achat des places
DES OZU MUETS EN CINÉ-CONCERTS
Yasujiro Ozu a tourné une trentaine de films muets, dont la majorité a disparu. D’autres, sauvegardés, seront proposés accompagnés au piano lors de ciné-concerts.
Chœur de Tokyo (1931, 1h30) – Accompagnement musical par Didier Martel – dimanche 10 décembre à 14h30 → Achat des places
Gosses de Tokyo (1932, 1h31) – mercredi 3 janvier à 16h30 → Achat des places
Où sont les rêves de jeunesse ? (1932, 1h23) – Accompagnement musical par Fred Escoffier – jeudi 21 décembre à 18h30 → Achat des places
Une femme de Tokyo (1933, 47min) – mardi 16 janvier à 18h30 → Achat des places
Histoire d’herbes flottantes (1934, 1h26) – dimanche 21 janvier à 14h30 → Achat des places
Une auberge à Tokyo (1935, 1h15) – dimanche 28 janvier à 14h30 →Achat des places
CONFÉRENCE SUR OZU PAR PASCAL-ALEX VINCENT
Mercredi 6 décembre
En présence de Pascal-Alex Vincent, cinéaste, enseignant, spécialiste du cinéma japonais
18h30 Conférence « Yasujiro Ozu, une affaire de famille » (env. 1h15) → Achat des places
À la pause, signature de son livre Yasujiro Ozu, une affaire de famille (La Martinière/Carlotta, 2023)
20h30 Le Goût du riz au thé vert (Y. Ozu, 1h56) → Achat des places
YASUJIRO OZU PAR WIM WENDERS
Samedi 9 décembre à 14h30 et jeudi 18 janvier à 16h30
Tokyo-Ga de Wim Wenders (Documentaire, 1985,1982)
Une déclaration d’amour de Wim Wenders, Prix Lumière 2023, à Yasujiro Ozu.
CONFÉRENCE SUR OZU PAR JEAN-MICHEL FRODON
Mardi 9 janvier
En présence de Jean-Michel Frodon, critique, enseignant, écrivain et historien du cinéma
18h30 Conférence « Beautés et surprises d'Ozu » (env. 1h15) → Achat des places
À la pause, signature de Treize Ozu (Cahiers du Cinéma, 2023)
20h30 Fleurs d'équinoxe (Y. Ozu, 1h57) → Achat des places
YASUJIRO OZU – KINUYO TANAKA : HISTOIRE D'UNE COLLABORATION ARTISTIQUE
Mardi 16 janvier
Soirée présentée par Mokhtar Maouaz (Guide conférencier)
Avant chacune des séances, évocation de la collaboration entre Yasujiro Ozu et son actrice Kinuyo Tanaka, qui devient réalisatrice dans les années 1950
Soirée présentée
18h30 CINÉ-CONCERT Une femme de Tokyo (Y. Ozu, 47min) → Achat des places pour le film
Accompagnement au piano par Didier Martel
20h15 Une femme dans le vent (Y. Ozu, 1h24) → Achat des places pour le film
→ Achat des places pour les deux films
Les films muets
Chœur de Tokyo Un employé d’une compagnie d’assurances est licencié après avoir pris la défense d’un de ses collègues. Père de deux enfants désormais sans ressource, il est obligé d’accepter la proposition de son ancien professeur de lycée qui vient d’ouvrir un restaurant… Dans un noir et blanc somptueux, une chronique sociale sur fond de crise économique. |
Gosses de Tokyo Keiji et Ryochi sont menacés sur le chemin de l’école par d’autres gamins. Leur père leur dit de ne pas se laisser faire. Mais les deux frères découvrent sa docilité face à son patron… Ozu, observateur clairvoyant de la condition humaine, signe ici une merveilleuse comédie néo-réaliste, un film où les enfants donnent une leçon aux adultes. |
Où sont les rêves de jeunesse ? Tetsuo Horino mène une vie insouciante à l’université et préfère traîner avec ses amis plutôt que d’accepter les mariages arrangés de son père. Le jour où ce dernier décède, Tetsuo abandonne ses études, hérite de l’entreprise familiale et engage ses camarades… Dans un subtil glissement de la comédie au drame, Ozu aborde la nostalgie du passage à l’âge adulte. |
Une femme de Tokyo Secrétaire le jour, Chikako travaille le soir dans un cabaret pour pouvoir payer les études de son frère Ryoichi. Lorsque ce dernier apprend son activité secrète, il décide de s’enfuir… Un mélodrame bouleversant traitant de la condition féminine. Avec Kinuyo Tanaka. |
Femmes et voyous Secrétaire le jour, Tokiko retrouve le soir le gang de voyous dirigé par son amant Joji. Elle veille sur le dancing tenu par ces truands… Un film au carrefour des genres, entre polar et mélodrame. Un film policier nippon à la manière américaine : appartements miteux, salles de billard enfumées, clubs de boxe suintants. |
Histoire d’herbes flottantes Le directeur d’une troupe de théâtre retrouve son ancienne maîtresse et leur fils. Ignorant tout de son père et le supposant mort, le fils accepte la venue de cet homme qu’il considère comme son oncle. Mais l’actuelle maîtresse décide de se venger par jalousie… Une intrigue amoureuse typique du cinéma hollywoodien adaptée par Ozu dans un sublime noir et blanc. |
Une auberge à Tokyo Un homme se résout à voler l’argent nécessaire aux soins de la petite fille malade d’une amie. Puis il se rend à la police… L’une des œuvres les plus attachantes d’Ozu qui parvient à trouver un savant équilibre entre drame et comédie. |
Les films parlants
Le Fils unique Une fileuse de soie sacrifie tout pour l’éducation de son fils. Treize ans plus tard, malgré les efforts de son fils pour l’accueillir, celle-ci découvre qu’il vit dans une situation précaire, déçu par les promesses de la grande ville… Premier film parlant d’Ozu, l’un de ses drames sociaux les plus poignants. |
Il était un père Dans une ville de province, Shuhei Horikawa, un enseignant veuf, mène une vie modeste avec Ryohei, son fils unique. Lors d’un voyage scolaire, un élève se noie… Avec la pudeur et la retenue qui sont sa signature, Ozu filme un thème universel et intemporel, celui d’une relation père-fils au fil du temps. Une œuvre sincère et bouleversante, avec Chishu Ryu. |
Récit d’un propriétaire Dans le Tokyo de l’immédiat après-guerre, un petit garçon erre dans les rues. Après tirage au sort, il est finalement confié à Tane, une veuve acariâtre qui n’a jamais aimé les enfants… Une chronique douce-amère sur la classe modeste des faubourgs de Tokyo. |
Une femme dans le vent Tokiko (Kinuyo Tanaka) vit seule avec son jeune fils Hiroshi en attendant que son mari soit démobilisé. Elle tente de survivre en vendant des vêtements. Lorsque Hiroshi tombe malade, elle n’a pas d’autre choix que de se prostituer un soir pour pouvoir payer son traitement… Un drame familial écrit par Ozu lui-même, certainement son film le plus triste. Inédit en France. |
Printemps tardif Noriko vit avec son père veuf, refusant de le quitter après le décès prématuré de sa mère. La jeune femme finit toutefois par accepter de prendre son envol. Et avant que leurs chemins ne se séparent définitivement, ils décident de faire un dernier voyage ensemble… Une œuvre déchirante sur l’amour filial dans le Japon de l’après-guerre, « un drame familial qui réchauffe le cœur » (Kiju Yoshida, Ozu ou l’anti-cinéma, Institut Lumière/Actes Sud). Avec Setsuko Hara, Chishu Ryu. |
Les Sœurs Munakata Setsuko et Mariko Munakata sont des sœurs que tout oppose. L’extravertie Mariko profite de sa jeunesse et de sa liberté, tandis que Setsuko travaille d’arrache-pied pour entretenir son mari. Mariko va tout faire pour rapprocher sa sœur d’Hiroshi… La confrontation entre deux mondes, l’ancien et le moderne, filmée « à hauteur de femme » par Ozu. Avec Kinuyo Tanaka, Hideko Takamine, Chishu Ryu. |
Été précoce À presque 30 ans, Noriko, vivant avec ses parents, son frère et sa femme et leurs enfants, ne souhaite toujours pas se marier et préfère vivre libre et travailler. Lorsque son patron lui propose d’épouser un jeune homme aisé, elle refuse… Un portrait de femme résolument moderne abordant la question existentielle du mariage et de ses enjeux. Avec Setsuko Hara, Chishu Ryu. |
Le Goût du riz au thé vert Mariée par arrangement, Taeko mène une vie de couple décevante. Le dialogue avec son mari se fait de plus en plus rare. Un jour, sa nièce Setsuko est bouleversée par l’annonce d’une rencontre imminente avec un prétendant pour un mariage arrangé… Une très juste étude de mœurs sur la vie de couple et ses aléas. Délicieux. |
Voyage à Tokyo Un couple âgé entreprend un voyage pour rendre visite à ses enfants. D’abord accueillis avec les égards qui leur sont dus, les parents s’avèrent bientôt dérangeants. Personne ne trouve de temps à leur consacrer. Les enfants se cotisent pour les envoyer dans une station thermale loin de Tokyo… Pour Kiju Yoshida (Ozu ou l’anti-cinéma, Institut Lumière/Actes Sud, 2004) : « Le Voyage à Tokyo est l’œuvre la plus aboutie de sa carrière, dévoile la profondeur de son art et donne tous les indicateurs qui permettent de déchiffrer son univers. » |
Printemps précoce Shoji, jeune employé d’une grande compagnie, passe la plupart de son temps au travail ou dans les bars alentour. Il entame une aventure avec une jeune collègue, mais les soupçons et les rumeurs se font bientôt persistants… Ozu aborde ici pour la première fois la question de l’adultère pour mieux appréhender le drame du monde salarié et l’importance de la famille. |
Crépuscule à Tokyo Takako vient de quitter son mari pour aller vivre avec son père et sa jeune sœur. Lorsqu’elle apprend que sa mère est de retour après plusieurs années et qu’elle tient un salon de mah-jong, Takako vient lui demander de ne pas révéler son existence à sa sœur… Dernier film d’Ozu en noir et blanc, un film remarquable d’une grande sobriété. Avec Setsuko Hara. |
Fleurs d’équinoxe Hirayama est attaché à ses valeurs conservatrices mais tient parfois un discours progressiste sur l’amour et le mariage. Toutefois, quand un jeune homme demande la main de sa fille, la décision d’Hirayama est sans appel : il refuse que sa fille épouse l’homme qu’elle aime… Un émouvant portrait de père de famille tiraillé entre conservatisme et progressisme. |
Bonjour Dans une ville de la banlieue de Tokyo, les mères de famille s’occupent de leur intérieur tout en jalousant celui des autres, les pères se croisent au café du coin et s’inquiètent de leur retraite à venir, tandis que les fils passent leur temps à regarder la télévision… Une chronique tendre et sensible sur l’enfance. |
Herbes flottantes Le meneur d’une petite troupe de théâtre kabuki, Komajuro, a eu un fils suite à une aventure avec l’une des habitantes d’un village de pêcheurs au sud du Japon. Le fils ne sait rien de l’identité de son père et ce dernier a caché bien d’autres vérités… D’une beauté plastique ébouriffante, un miracle du procédé Eastmancolor. |
Fin d’automne Trois vieux amis, Taguchi, Mamiya et Hirayama, se réunissent lors d’une cérémonie en mémoire de leur ami Miwa, décédé quelques années auparavant. Ils y retrouvent Akiko (Setsuko Hara), la veuve du défunt dont ils étaient tous amoureux dans leur jeunesse, et sa fille, la jolie Ayako, en âge de se marier… Un film humaniste plein de tendresse. Une étude des mœurs nippones. |
Dernier caprice Manbei est le patron d’une brasserie de saké au bord de la faillite. Le vieil homme est entouré de ses trois filles : Akiko, veuve et mère d’un petit garçon, qu’il souhaite remarier ; Fumiko, dont l’époux est le gérant de la brasserie ; et Noriko, qui refuse tous les prétendants choisis par sa famille… Entre humour et drame, Ozu poursuit son observation de la famille japonaise. |
Le Goût du saké Hirayama (Chishu Ryu) approche de la retraite et vit toujours avec sa fille Michiko qui est en âge de se marier. Le père comme la fille repoussent l’échéance, l’un craignant la solitude et l’autre la culpabilité de l’abandon… L’ultime chef-d’œuvre de Yasujiro Ozu et l’un de ses récits les plus touchants et personnels. |
Tokyo-Ga
de Wim Wenders
(République fédérale d’Allemagne, États-Unis, 1985, 1982, N&B et coul.)
Des salles de pachinko à des squares où des adolescents dansent le rock, en passant par des cimetières où les enfants jouent au base-ball, Wim Wenders déambule dans Tokyo, à la recherche de l’univers de Yasujiro Ozu. Il filme longuement, comme au hasard, s’arrête, observe. Et interroge deux anciens collaborateurs d’Ozu, Chishu Ryu, acteur fétiche, et Yuharu Atsuta, assistant puis directeur de la photo.
Samedi 9 décembre à 14h30
Jeudi 18 janvier à 16h30
Ce site nécessite l'utilisation d'un navigateur internet plus récent. Merci de mettre à jour votre navigateur Internet Explorer vers une version plus récente ou de télécharger Mozilla Firefox. :
http://www.mozilla.org/fr/firefox