JOLIS MONSTRES
5 bonnes raisons d'aller voir
Pauvres mais beaux

 


Posté le 15.04.2016 à 12H20


 

1957, l'Italie se relève lentement de la guerre et de ses privations, bientôt ce sera le "boom" économique et (presque) la société des loisirs. Avant d'être le réalisateur du Fanfaron et des Monstres, peintre cruel et drôlatique de ses contemporains, Dino Risi touche le jackpot avec une comédie qui dit la vitalité de la jeunesse romaine : Pauvres mais beaux, ou les peines et les joies (sentimentales) de deux jeunes voisins, meilleurs... ennemis en conquêtes amoureuses. Le succès sera tel que deux suites seront mises en chantier à la hâte, Beaux mais pauvres puis Poveri Millionari. Pourquoi se précipiter à ce film rarissime, restauré par la Cinémathèque de Bologne ? Explications ci-dessous.

 Poveri

 

1/ Parce qu'on ouvre une porte et c'est Piazza Navona...

Le miracle des vieux immeubles romains : un entrelacs d'escaliers à la Piranèse, une terrasse qui donne sur les toits de la ville éternelle, et, derrière la grosse porte en bois, la plus belle place de Rome. La Piazza Navona de Pauvres mais beaux n'est pas encore envahie de touristes et de marchands de maillots de foot, mais on voit déjà le glacier Tre Scalini, meilleur "tartufo" de la capitale, lieu de pélerinage de qui visite Rome.

 

2/ Parce qu'on se baigne dans le Tibre...

Quatre ans après Vacances Romaines, on continue de faire la fête sur les rives du fleuves. Renato Salvatori, l'un des deux playboys du film, retrouve l'emploi qu'il a quitté pour être acteur : maître-nageur chez Ciriola, une barge-ponton où l'on bronze et d'où l'on plonge. Ciriola existait, raconte Dino Risi dans ses mémoires, Mes monstres (Editions de Fallois / L'Âge d'homme), et "avait à son actif de nombreux sauvetages de piètres nageurs et de candidats au suicide". Dans les scènes chez Ciriola, "la superbe Marisa [Allasio, la pin-up du film] portait un bikini si exigu qu'elle était pour ainsi dire nue. Dans la rue on entendait des braillements, des sifflets, des couinements de klaxon, des coups de frein et le bruit des voitures qui s'emboutissaient."

 

3/ Parce que les dialogues font mouche...

Deux beaux garçons romains découvrent les joies du marivaudage, et font de la poésie comme Signor Jourdain faisait de la prose : "Mon coeur pétille, dit l'un, c'est comme si je buvais de l'eau gazeuse." Et l'autre, soudain philosophe et écolo  : "Que serions-nous sans les femmes ? Comme des plantes sans la chlorophylle." Personne n'a sa langue dans sa poche, d'ailleurs, puisqu'à l'un des héros on lance : "Ne pense pas trop aux filles, tu vas attraper une méningite...

Bailiamo

 

4/ Parce que c'est La Dolce Vita des pauvres...

Ce n'est pas encore l'abondance : à défaut de se payer une chambre, le conducteur du tram de nuit loue le jour le lit où Renato Salvatori dort la nuit... Echanges cocasses à la clé. Mais tout de même, trois ans avant les Thermes de Caracalla revisités par Fellini, on va diner à l'Antica Roma, resto chic où les serveurs portent des toges, et le voiturier conduit un char. La belle Giovanna tente de mâcher la volaille qu'on lui a servie : "C'est le poulet qui est antique..."

 

5/ Parce que c'est un irrésistible festival de trognes burlesques...

Outre les héros brillantinés et leurs costumes trop larges et trop rayés, leurs fiancées en bikini ou robe d'été décolletée, le petit peuple romain est à l'honneur de cette comédie pagailleuse et bruyante : concierge paresseux qui garde précieusement les messages urgents au lieu de les distribuer; tailleur qui règle les problèmes d'épaulette en mordant les costumes ; disquaire qui ramène nuitamment des clientes mélomanes dans son échoppe - et pas forcément pour leur faire écoute les derniers tubes. Des monstres, déjà ?

 

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 Adrien Dufourquet

 


Pauvres mais beaux de Dino Risi

Dimanche 17 avril à 14h30 - Mardi 19 avril à 19h

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