3 questions à... Nathalie Crinière

 


Posté le  08.04.2015 à 11h05


 

Scénographe, diplômée de l'école Boulle et de l'école des Arts décoratifs de Paris, Nathalie Crinière s’est spécialisée dans la scénographie d'expositions. On lui doit, entre autres, la mise en espace de Jean Cocteau sur le fil du siècle (2003) au Centre Pompidou, ¡Almodóvar : Exhibition! (2006) et François Truffaut (2014) à la Cinémathèque française. Elle revient sur son travail mené pour l'exposition Lumière ! le cinéma inventé.

 

 

LUMIERE Vues Expo 03
Photo: Pascal Amoyel

 

Le hall du Grand Palais, avec son histoire, son architecture imposante et ses espaces immenses n’est-il pas un piège et comment s’en accommoder pour l’aménager ?

    Concordance d’époques, concordance de visions d’inventeurs hors pairs , concordance de noms… Une exposition sur « le cinéma inventé des Frères Lumière » et le salon d’honneur du Grand Palais étaient faits pour se compléter. Un Salon Indien au salon d’honneur cela ne s’invente pas ! Dès lors, la hauteur démesurée de l’espace, l’entrée déportée, la proportion tout en longueur de la salle sont autant de contraintes à exploiter. Les très longues images du photorama s’épanouissent sur la hauteur de l’espace tandis que les 1 400 films profitent de la longue perspective pour se laisser découvrir d’un seul tenant. Le Salon indien est le point de pivot. Les verres interactifs enrichissent les contenus. Les Autochromes et les photos contemporaines se jouent du rythme des moulures existantes, les projections de Sortie d'usine (l’originale et les contemporaines) introduisent l’exposition et la concluent. La boucle est bouclée…

 

Contrairement à l’exposition sur Truffaut, que vous avez mise en scène récemment pour la Cinémathèque française, celle-ci est privée des extraits sonores et conversations qui apportaient intimité et émotion. Comment aider le visiteur à retrouver une histoire certes plus lointaine mais qui fut aussi faite de passion ?

    Vous savez, le son est peut-être la chose la plus difficile à exposer, alors ne pas avoir à s’en soucier pour une fois n’est pas pour me déplaire. À chacun de créer sa propre musique. La durée de la projection des films lumière est par contre un atout. Elle aide à la proximité car, en 50 secondes, l’histoire est plantée. Le visiteur est plongé dans un monde spécifique dont les 1 400 films présentés montrent la diversité. De plus, grâce aux écrans interactifs, le visiteur pourra enrichir le sujet. Le dispositif réservé aux prises de vue des opérateurs, couplé aux webcams montre combien passé et présent se conjuguent. Tant d’années se sont-elles ainsi passées ?

 

Les dispositifs techniques et les technologies contemporaines mises en oeuvre semblent vouloir souligner en quoi cet héritage des Lumière est encore vivant et « moderne ». Était-ce l’obsession principale ?

    Obsession non ! Il ne s’agit surtout pas de faire de l’exposition un catalogue de nouvelles technologies… Mais à regarder le travail des Lumière les analogies sont flagrantes : comment voir en 3D aujourd’hui ? Que devient le Photorama ? Ce qui est intéressant c’est que les préoccupations sont les mêmes. Les réponses sont différentes mais voir à 360° n’a pas fini de nous préoccuper et dématérialiser le support de l’image n’a pas fini de faire rêver.

 

Propos recueillis par Pierre Sorgue