GEORGE STEVENS
par Positif


Posté le 01.02.2016 à 11H


 

Annex Taylor Elizabeth A Place In The Sun NRFPT 04

 

« Un temps George Stevens fut parmi les cinéastes les plus respectés d’Hollywood : cet ancien caméraman et monteur fut l’un des premiers à conquérir l’envié final cut. Paradoxalement, cela ne lui valut guère l’indulgence de la politique des auteurs : son inspiration était trop classique, trop sentimentale et son parcours trop marqué de "bonnes intentions". On a pardonné celles-ci à Capra. Il serait temps d’en faire autant pour Stevens. »  C'est par ces mots que s'ouvre le dossier que consacre la revue Positif, dans son numéro de février, au cinéaste George Stevens. Un dossier complet qui, de propos rapportés en analyses (son style, son humanisme, la place de James Dean dans son œuvre...), dessine les contours d'un cinéma aussi canonique et singulier – parallèlement mis à l'honneur à l'Institut Lumière. Extraits.

 

Il y a une autre histoire du cinéma, plus authentique, plus complexe et plus vivante que celle des critiques, écrite par les œuvres et les artistes. Une place au soleil s’impose comme l’un des flms les plus admirés par les créateurs américains des années 50 à 90. À la question des modèles, des cinéastes aussi différents que King Vidor, Cecil B. DeMille,Rouben Mamoulian, mais aussi John Frankenheimer, Sidney Lumet et même Terrence Malick ont une réponse en commun – George Stevens. Tout cela oblige à revoir et repenser Stevens.

Pierre Berthomieu, maître de conférences en études cinématographiques à l'Université Paris-Diderot, évoquant la désaffection critique dont George Stevens a souffert en France.

 

Point fort du talent de George Stevens, reconnu de tous, sa direction d’acteurs. Ou plutôt sa non-direction, car Stevens ne leur imposait rien. Il les faisait répéter aussi longtemps qu’ils le souhaitaient et n’intervenait que pour suggérer des corrections. « Si un acteur n’a pas besoin d’aide, il ne faut surtout pas interférer avec la confance qu’il a en lui. Si un acteur n’a pas seulement besoin d’aide, mais d’un fort soutien, alors il faut le lui donner (…) Et s’il est toujours perdu, lui expliquer le concept même du rôle et la manière de dire le dialogue. Et il faut toujours le faire calmement, jamais en la présence des autres comédiens »

Michel Cieutat, critique, analysant la patte du réalisateur.

 

SUR LES AILES DE LA DANSE 1936 01

Le fait que George Stevens ait commencé comme opérateur de slapstick des studios Hal Roach (...) est peut-être à l’origine d’un paradoxe. Il semble que deux phénomènes contradictoires président à la réalisation d’un gag réussi. D’abord, quelle que soit l’habileté d’une description sur le papier, c’est au moment du tournage que l’on s’aperçoit si un gag " fonctionne " ou pas. Si ce n’est pas le cas, il faut trouver sur le champ de nouvelles idées pour le faire fonctionner : c’est souvent sur la spontanéité et l’improvisation que se base la réalisation du moment comique. Mais la recherche de cette étincelle peut requérir de très nombreuses prises, jusqu’à ce que le déclic se produise et que " ça marche ". La survenue d’un " moment de grâce " se conjugue à l’inlassable répétition permettant d’éventuellement l’atteindre, l’inspiration est le fruit d’un patient labeur (...) La lenteur d’exécution combinée à l’éclair du moment, le tout retravaillé au montage, telle est donc la méthode du réalisateur George Stevens.

Yann Tobin, critique, regrettant que George Stevens n'ait pas persévéré dans la comédie musicale.

 

I Remember Mama offre un bon résumé, voire un condensé, du mélodrame selon Stevens : sentimentalisme, rêves d’évasion et d’ascension sociale qui souvent se brisent sur l’obstacle du réel, mais qu’une providence tout humaine est susceptible d’encourager (...) et qui se réalisent – parfois.

Jean-Loup Bourget, professeur d'études cinématographiques à l'École normale supérieure, concluant un panorama des mélodrames réalisés par Stevens.

 

GEANT 1956 Tou 04

Les images indélébiles d’Auschwitz, de Falkenau, de Majdanek, vous hantent à jamais. Celles prises par Stevens sont d’autant plus marquantes que, flmés par lui, les corps décharnés, les visages émaciés, l’amoncellement des cadavres ont la couleur de la peau. Le teint rosâtre des carnations vous foudroie.

Laetitia Mikles, documentariste et critique, racontant la mission documentaire menée par Stevens à la fin de la Seconde Guerre mondiale.

 

La volonté d’indépendance du réalisateur peut rappeler celle de Dean qui, lorsqu’on l’interrogeait sur son rapport à Hollywood, répondait : « Vous devez faire des sacrifces personnels à Hollywood, les tournées publicitaires et tout le reste, mais rien ne vous oblige à faire des compromis sur le plan du métier ». La persona publique et fctionnelle de l’acteur semble entretenir des rapports étroits avec le propre parcours du réalisateur. Pour l’un comme pour l’autre, vivre à l’intérieur du système suppose un minimum d’écart vis-à-vis de celui-ci, un espace de compromis nécessaire entre l’art et l’industrie, les valeurs et leur réalité concrète.

Jacques Demange, critique, à propos de la collaboration de George Stevens et James Dean, décédé peu de temps après la fin du tournage de Géant.

 

 


Rétrospective George Stevens
Jusqu'au 26 février