G comme Gavras

 


Posté le  02.09.2015 à 10h02



PARCOURS - Jusqu'au 3 octobre, l'Institut Lumière ouvre ses salles de projection au réalisateur franco-grec pour une grande rétrospective de son œuvre en sa présence. Cinéaste engagé, Costa-Gavras a bâti une trajectoire cinématographique ornée de 23 films, tous fidèles à des convictions politiques humanistes profondément ancrées, pointant les injustices générées par les puissants de ce monde.

Petit tour d'horizon de l'univers du réalisateur au travers de cet abécédaire non-exhaustif.

 

 

A comme... assistant-réalisateur : En 1960, Costa-Gavras effectue ses premiers pas au cinéma comme assistant-réalisateur aux côtés de Jean Giono, qui tourne alors Crésus. En 1963, c'est au tour de René Clément, qui débute le tournage du Jour de l'heure, avec Simone Signoret et Michel Piccoli, de s'attacher les services du jeune Gavras. Jusqu'à Compartiments tueurs, son premier long métrage sorti en salles en 1965, le cinéaste assistera plusieurs grands noms du cinéma hexagonal tels Henry Verneuil (Un singe en hiver, 1962), Jacques Demy (La baie des anges, 1963) ou encore Jean Becker (Échappement libre, 1964). « À l’époque, ce sont les assistants qui composaient le casting des films et ayant occupé ce poste pendant de nombreuses années, je connaissais beaucoup d’acteurs », précise Costa-Gavras.

F comme... France : Après son départ précipité de Grèce, à tout juste 19 ans, Costa-Gavras regagne la France et Paris pour poursuivre des études de lettres à la Sorbonne. Durant son temps libre, il fréquente assidûment la Cinémathèque Française - dont il est l'actuel président - et découvre Les Rapaces, film d'Erich Von Stroheim qui le marque par sa longueur inhabituelle et son « happy end ». « Une tragédie comme les grandes tragédies du théâtre antique ou moderne. Cela voulait dire que l’on pouvait faire au cinéma autre chose que ce que je connaissais », dira-t-il. En 1956, il intègre l'Institut des hautes études cinématographiques (IDHEC) et s'immerge à temps plein dans le 7e Art, avec la carrière qu'on lui connaît. Il sera naturalisé Français en 1968. Depuis, il aime rappeler que la France lui a « tout donné », même s'il n'oublie pas ses racines grecques.

 

 

P comme... pouvoir : Dire que le pouvoir est une thématique chère au réalisateur franco-grec peut apparaître tel un euphémisme au regard de la détermination avec laquelle il a exploré ce sillon au cours de sa carrière. Forcé de quitter la Grèce pour étudier en raison des convictions anti-royalistes de son père, Costa-Gavras n'a eu de cesse, depuis ses débuts derrière la caméra, de marteler son engagement politique et son refus,  notamment, des totalitarismes. En 1969, le cinéaste signe avec le premier acte d’une trilogie sur le pouvoir que vont boucler L’Aveu (1970) et État de siège (1973). Les conflits (Hanna K., 1983), la religion (Amen, 2002), les coups d’État (Missing, 1982), la finance (Le couperet, 2005 et Le capital, 2012), la guerre (Music box, 1993) ou encore les médias (Mad City, 1997) : rien n'arrête Gavras dans sa volonté de pointer les failles du pouvoir sous toutes ses formes.

S comme... sentiments : Au cours de sa carrière, le cinéaste s'est aussi parfois détaché de son fil rouge politique pour s'essayer, notamment, à la comédie intimiste, où il dévoilera à son public un talent certain à mettre en scène les sentiments. D'abord avec Clair de femme (1979, avec un casting quatre étoiles réunissant Romy Schneider et Yves Montant), dont il estima à l'époque que c'était son adaptation la plus réussie. Le film est tiré du roman éponyme de Romain Gary paru en 1977. Puis, dans un registre plus proche de la comédie pure, avec Conseil de famille (1986), où il se penche sur le quotidien d’une famille peu conventionnelle.

Z comme... Z ! : C'est le film qui a définitivement confirmé son talent et épinglé son nom aux côtés de ceux des grands du 7e Art. Le succès qu'a rencontré Z à sa sortie ne laisse rien deviner du chemin tortueux qui a mené à sa réalisation. Les financements du long métrage furent compliqués à obtenir. Pour ne pas s'associer à ces difficultés, les deux acteurs principaux, Jean-Louis Trintignant et Yves Montant, acceptèrent d'ailleurs de réduire leurs émoluments. Film éminemment politique, bouclé en pleine dictature des colonels en Grèce, Z ne pu être tourné sur la terre natale du cinéaste et c'est vers l'Algérie que ce dernier se tourna pour mener son projet. À sa sortie, le long métrage reçut un accueil très favorable de la part de la critique. Il fut récompensé du Prix du jury en 1969 au Festival de Cannes et de l'Oscar du meilleur film étranger en 1970. Rapporté à notre époque, le film offre des similitudes troublantes avec la crise que traverse la Grèce à l'heure actuelle.

B.P.

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> Rétrospective entièrement dédiée à Costa-Gavras du 1er septembre au 3 octobre 2015 à l'Institut Lumière

Lire l'entretien avec Costa-Gavras à propos de Z