Qui était Georg Wilhelm Pabst

L’homme qui a découvert Loulou !


Posté le 11.02.2020 à 10H30


 

L'homme qui a révélé Louise Brooks ! Retour sur une carrière incontournable de l’histoire du cinéma en 12 films - ressortis par Tamasa - constamment inventifs et d’une grande maîtrise de la mise en scène.

Georg Wilhelm Pabst (1885 – 1967) : une énigme, un puzzle, "un véritable auteur ballotté par l’Histoire" selon la formule de l’historien allemand Eric Rentschler. Pendant la République de Weimar (1928-1933), ce Viennois d’origine est l’un des plus grands cinéastes du moment, l’égal de Fritz Lang, de F.W. Murnau – supérieur, dit-on alors, aux meilleurs techniciens américains. Il mâtine d’expressionnisme le réalisme social de la "nouvelle objectivité", ce mouvement dont les peintres Otto Dix et George Grosz sont les représentants les plus célèbres.

 

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Progressiste, humaniste, doté d’une immense culture, Pabst scrute alors les tourments les plus secrets de l’âme humaine. Dans ce qu’on appellera sa « suite freudienne » se mêlent sexe et violence : La Rue sans joie (1925), où la star montante Greta Garbo croise l’idole vieillissante Asta Nielsen, L’Amour de Jeanne Ney (1927), sublime mélodrame ; puis, la même année 1929, deux films qui révèlent et consacrent la puissance érotique de Louise Brooks : Loulou, d’après la pièce scandaleuse de Frank Wedekind, et Le Journal d’une femme perdue.
 
"Pabst est un homme de petite taille, racontera Louise Brooks : larges épaules, torse épais. Au repos, il paraissait lourd. Mais sur le plateau, ses jambes semblaient des ailes, qui s’accordaient à la rapidité de son esprit." Elle ajoute : "Ceux qui connaissaient bien Pabst avaient aussi le sentiment de ne pas le connaître du tout…"

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Passé au parlant, il adapte L’Opéra de quat’sous, de Brecht, puis le brûlot pacifiste d’Ernest Johansen, Quatre de l’infanterie (le film sera d’ailleurs interdit par le régime nazi). Il signe de spectaculaires coproductions - parfois en double version, française et allemande - comme La Tragédie de la mine (1931), hymne à l’entente entre les peuples. Fait un détour à Hollywood, revient en France, où il dirige notamment Louis Jouvet et la débutante Elina Labourdette dans Le Drame de Shanghai (1938).

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Une ombre s’installe sur l’Europe. Elle recouvre presque entièrement le cinéaste. Alors que la guerre semble imminente, Pabst songe fuir aux Etats-Unis, mais une hospitalisation l’a retenu à Vienne. Est-il vraiment trop tard pour fuir ? Est-il prisonnier des circonstances ? Il tourne en pleine guerre deux biographies historiques qui ne sont pas directement des films de propagande, mais qui servent l’idéologie du Reich. L’après-guerre est une quête de rachat, qui le voit revisiter l’histoire récente de l’Allemagne nazie pour construire a contrario l’identité de la nouvelle République fédérale allemande. Ainsi C’est arrivé le 20 juillet (1955) retrace-t-il l’attentat raté contre Hitler en 1944. Les années ont passé, son talent est intact.