Billetterie

Hommage à Pierre Rissient, Mister Everywhere

 

Bertrand Tavernier : « Pierre Rissient est mort cette nuit. Son épouse Yung Hee me demande de vous le faire savoir et, en pensant à elle, c’est avec une infinie tristesse que j'écris ce message. Pierre était un grand être humain et un cinéphile absolu. Nous le pleurons. »


Cinéphile éclairant et éclaireur, Pierre Rissient fut, tour à tour, programmateur de cinéma, attaché de presse, distributeur, producteur, réalisateur…  Au début des années 1960, il crée le Cercle de cinéphiles Mac-Mahon, puis devient assistant-réalisteur de Claude Chabrol, attaché de presse de Jacques Deray, de Jean Renoir et du Servant de Joseph Losey. Distributeur, il sort en France Shock Corridor de Samuel Fuller et défend les cinéastes Léo McCarey et Abraham Polonsky. Proche de Jerry Schatzberg, Clint Eastwood, Francis Ford Coppola et Quentin Tarantino, il a oeuvré à la reconnaisse européenne de Jane Campion, King Hu, Lino Brocka… C’était un intime de l’Institut Lumière et du festival Lumière, où le film que Benoit Jacquot et Pascal Mérigeau lui ont consacré, Gentleman Rissient, fut plusieurs fois projetés. 

Cinq et la peau, le long-métrage de Pierre Rissient réalisé en 1982, tourné à Manille, est sélectionné à Cannes Classics 2018, et sera projeté lundi 14 mai. Le film ressortira en France mercredi 30 mai (Carlotta Films).

Pierre Rissient était Mister Everywhere.

 

Pierre Rissient

 

« Il n'y avait chez moi aucune ambition, aucun calcul pour un futur. Lire un livre que l'on a pas encore lu, attendre un film, ou en programmer un… C’était une boulimie : voir, savoir, connaître sentir. J'étais de plus en plus passionné, happé par les films, le théâtre, la littérature, tant et si bien qu'après mon bac c'était à peine si j'assistais à deux ou trois cours de droit. Je suspendis mes études par cinéphile.

Durant le service militaire, nous avons mis en place le Cercle de Mac-Mahon, vu qu'au service cinématographique des armées je pouvais sortir tous les soirs et que mes week-ends étaient libres. Le but était d’organiser des avant-premières au Mac-Mahon pour présenter des films et des auteurs que nous défendions. Nous y invitions des journalistes et des critiques. Le film qui ouvrit avec succès la programmation du Cercle, en 1961, fut Blind Date, de Joseph Losery. (…)

Peu à peu, de manière souterraine, avec la compréhension gagnée grâce à certains films, l'idée qu’il me faudrait travailler et gagner ma vie est venue. Je n'avais pas la mise en scène en tête. Je lisais encore beaucoup et pensais que j'avais un certain sens de la construction. J'ai jeté quelques idées sur le papier, comme de très courtes nouvelles. L'un des patrons du groupe de garages où travaillait mon père connaissait Henri Decoin. Mon père m'obtint un rendez-vous avec lui pour le tournage de La Chatte. Sur ce film, je rencontrai Michel Deville, qui est resté un ami. J'étais un peu désorienté. Sans doute était-je trop jeune pour savoir poser les bonnes questions à quelqu'un de discret et bourru, mais que l'on présentait très affectueux. J'ai ensuite été stagiaire sur Les Cousins de Claude Chabrol (…)

Pendant que j'animais Le Cercle, j'avais commencé de manière inopinée une activité d'attaché de presse. José Giovani me demanda de voir Du rififi à Tokyo de Jacques Deray. Au cas où je l'aimerais, me dit-il, je pourrais le défendre auprès de la critique. Le film avait du style et je lui appliquais la même méthode que celle mise en place pour les films du Cercle : des projections privés et des longues interviews du cinéastes, me démarquant ainsi des attachés de presse de l’époque qui proposait uniquement des entretiens avec les vedettes. Je travaillais sans dossier de presse, sans filet, je suis contre la méthode actuelle qui assène un fatras documentaire dont on ne retire rien. On doit travailler sans filet. »

Extraits de Mister Everywhere, entretiens avec le journaliste Samuel Blumenfeld (Institut Lumière / Actes Sud).

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